Présentation du film

Eoliennes : les mensonges du vent
Le documentaire intitulé Eoliennes : du rêve aux réalités connaît un succès viral sur Internet. Avec près de 200 000 spectateurs en trois semaines, il se rapproche d’une audience moyenne sur une chaîne nationale. Le doc écolo Demain, de Mélanie Laurent et Cédric Dion, devenu culte depuis, avait lui aussi osé une levée des fonds en dehors de toute participation d’une chaîne publique ou privée. Celui de Charles Thimon n’est pas anti-écolo mais anti-éolien. Avec 200 000 euros, une vingtaine d’intervenants, un travail précis d’analyse des données chiffrées et un format très long (2h), il nous fait entrer avec talent dans les arcanes d’une duperie collective. Charles Thimon a été frappé par le contraste entre ces mâtures majestueuses dans des décors de rêve, ces rentes distribuées aux propriétaires privés ou aux collectivités locales et leurs résultats plus que décevants. Il n’est pas le seul : la colère contre les éoliennes a animé les élections régionales et départementales. Les cas de la montagne Sainte-Victoire, de la baie de Somme et de Saint-Brieuc, et bien d’autres, sont régulièrement traités dans les médias. Il ne s’agit d’ailleurs pas de rejeter l’éolien par principe. Personne ne dira qu’il n’est pas une source intéressante d’énergie dans des pays peu habités qui bénéficient de bons régimes de vents.

En revanche, sont-elles vraiment nécessaires dans un pays densément peuplé, dont les paysages sont un atout patrimonial et touristique et qui a développé sans accrocs depuis soixante ans une électricité propre ? La réponse est non ! L’exception française était pourtant criante : elle produisait une électricité décarbonée à bas coût, grâce au nucléaire et à l’hydroélectrique. Pourquoi fallait-il qu’elle monte dans cette galère ? « On a rhabillé en « politique climatique » une subvention massive d’éoliennes et de panneaux solaires dont le résultat est nul, puisque cette électricité se substitue à une autre, le nucléaire, qui produit deux fois moins de CO2 sur l’ensemble de son cycle de vie. Un tel aveuglement aboutit par exemple à ne pas se demander si ces milliards ne seraient pas beaucoup plus efficaces s’ils étaient consacrés à l’isolation des bâtiments, à l’agriculture ou aux transports », commente Charles Thimon. Ce documentaire ouvertement à charge – et pourquoi ne le serait-il pas quand on voit sans cesse des documentaires à charge sur les chaînes du service public ? – dresse donc un bilan négatif et pas seulement pour la France. La liste est longue : nuisances sonores, effets sur la pollution des sols et des fonds marins, mauvais bilan carbone, prix dopé, énergie instable produite à partir de composants importés du bout du monde, chaînes d’investissements opaques et opportunistes.

Mais la conjuration des antinucléaires n’avait rien de plus pressé que de tourner la page de cette énergie qui a sauvé la France de la tyrannie des hydrocarbures. Les orateurs de l’écologie, cités dans le documentaire, font de l’éolien et du solaire la vitrine d’un nouveau modèle de société. Ces nouvelles énergies sont censées ouvrir sur des territoires autogérés, chacun pilotant en toute transparence (le mot est sacré !) son éolienne et ses panneaux solaires. Le tout sans risque et sans pollution. Face à cette image idyllique, digne des bergers de l’Arcadie, l’énergie nucléaire était… le mouton noir. Mais les défauts des énergies renouvelables sont peu à peu apparus. Et les qualité du nucléaire redeviennent dicibles. Par exemple, celle-ci : les 56 réacteurs sont répartis sur 18 sites déjà construits et « ils utilisent 400 fois moins d’espace que l’éolien pour une même puissance ». Charles Thimon précise qu’il ne reçoit aucun subside des lobbys du nucléaire.

L’écologie radicale présente le nucléaire comme l’incarnation maléfique d’une société opaque, technocratique, hiérarchique et centralisée. Telle est la cohérence du dogme vert : à un nouveau modèle politique, un nouveau mode de production de l’énergie. Cette opposition symétrique des deux mondes est digne d’un jardin à la française. Mais elle est trompeuse sur toute la ligne. La gestion des éoliennes est opaque, affairiste et relève de l’arbitaire administratif. Leur montée en puissance est aussi la preuve d’une inconscience collective qui confine à la folie. Elle suppose que la société de la « sobriété heureuse » s’accommode des coupures de courant à toute heure du jour et de la nuit et qu’elle institue la précarité énergétique en un nouvel art de vivre. Chacun imagine bien qu’il en résulterait un chaos social généralisé. L’éolien est une énergie d’appoint mais ne peut en aucun cas prétendre se substituer au nucléaire ou, malheureusement, au charbon.

Or il y a des moyens d’éviter la politique du pire en assumant le chemin déjà tracé par l’atome. Par rejet du nucléaire, par mimétisme avec les pays du Nord – mais pas tous, la Suède, la Norvège et l’Angleterre sont pronucléaires -, par peur de rater la prochaine révolution énergétique et ses marchés d’exportation, les gouvernements français ont cédé aux sirènes de l’éolien et du solaire. Ils avaient raison de vouloir profiter de l’émergence d’une nouvelle industrie afin d’exporter dans les pays demandeurs mais la Chine les a pris de vitesse. Nous savons désormais que les généraliser France, en revanche, n’était pas une bonne idée.

Aujourd’hui l’opinion réapprend peu à peu à peser de manière objective les avantages et les risques du nucléaire. Il est donc plus que temps de se défaire de l’atome honteux. Charles Thimon a raison d’insister sur le fait que nous avons avec l’Allemagne une démonstration en grandeur réelle de l’échec d’une transition énergétique reposant sur le renouvelable. « L’électricité y coûte deux fois plus cher qu’en France mais les émissions de gaz à effet de serre ne diminuent pas car cette énergie intermittente suppose le concours de centrales à charbon », explique très bien Jean-Marc Jancovici, l’un des interviewés. L’Allemagne a déjà investi 500 milliards d’euros dans un modèle qui n’est pas viable, d’autant plus qu’il faut prendre en compte la vraie neutralité carbone, en mesurant aussi les quantités de CO2 émises ailleurs pour produire les éoliennes importées de Chine.

En 1950, l’Europe a commencé par une convergence franco-allemande sur l’énergie. La mise en commun des bassins houillers de la Rhur et de la Sarre a permis à la France de se reconstruire plus vite, et, en échange, l’Allemagne a accéléré son retour dans la famille européenne. Cette idée d’un engrenage d’intérêts différents mais complémentaires est aujourd’hui gravement en panne en matière de politique énergétique. L’Allemagne continue de batailler contre l’atome au niveau européen, tout en soutenant l’importation du gaz russe. Il est temps de lui dire que son obsession antinucléaire est son problème et qu’il reste notre solution.
Charles Jaigu
cjaigu@lefigaro.fr

« Eoliennes : du rêve aux réalités » Documentaires de 1h 58 par Charles Thimon, produit par Documentaire et vérité.